Les "Black Watercolors", que Joachim Bandau entame il y a 50 ans, sont des superpositions de couches d’aquarelle gris clair déposées manuellement à l’aide de pinceaux plats japonais pour atteindre des noirs profonds.
« Le regardeur décode l’œuvre à l’envers », nous livre l’artiste, évoquant la composition de ces peintures à partir d’une multitude de peintures individuelles (parfois plus d’une quarantaine de couches). « Chaque nouvelle surface est une réponse à la précédente, disposée selon un arrangement intuitif dans une séquence temporelle. Je passe parfois des mois, des années sur une œuvre. » On peut également y voir des films photographiques accidentellement décalés, aux contours brouillés par des mouvements soudains et erratiques. Ou bien des éclats de verre étalés comme des cartes en éventail. C’est une durée enregistrée sur le papier comme les débuts du cinéma et la chronophotographie.
La superposition des couches d’aquarelle est de l’ordre de la sculpture, comme une masse en train de s’ériger. Des formes apparaissent, l’espace se divise selon le point de vue du spectateur. Dans leur autonomie radicale, ces feuilles aussi concentrées que méditatives, et qui représentent sans doute l’œuvre la plus personnelle de Bandau, permettent dans leur transparente et liquide apesanteur, de poser un regard ouvert sur l’espoir du sculpteur de dompter une forme.